chronique haïku 12

De l’intime des pièces à vivre (près de la pendule, ou à l’heure du goûter près d’un enfant…) jusqu’au Cosmos ; D’ici ( sa terre bretonne, son île de naissance, Ré) jusqu’aux plus lointains “ailleurs ” (la Scandinavie ou Shikoku), du plus petit à l’immense…Danièle Duteil, en irréductible haïjine, regarde poétiquement Tout de ce monde.

Dans ce dernier recueil comme dans ceux qu’elle a déjà composés, elle nous propose un réel transfiguré par le travail des mots, ce qui est la définition même de l’acte poétique. Mais en ayant choisi de cheminer dès le titre “aux côtés de Santoka ”,  l’un des maîtres classiques du haïku les plus anti-conformistes et radicaux qui soit, elle annonce ses choix d’écriture : un respect pas seulement mécanique, mais plutôt opportun du 5/7/5 ; une inspiration entièrement née de la situation ; une ouverture aux gestes humains les plus familiers…ou amusants

doucement

Il parle de la pleine conscience

son sourire édenté


salon de coiffure

les femmes de mèche

livrent leurs secrets d’alcôve

De toutes ces inspirations, celles de la poétesse en marche près de Santoka me semble la plus vibrante. Lui le mendiant qui chercha tant, de monastères zen en auberges à saké, l’apaisement de son âme torturée et elle, qui sur sa terre bretonne, chemine dans des paysages marins ou des jardins clos qui lui racontent passé et présent. Qu’ont-ils à échanger si ce n’est l’essence d’une présence au monde entière, toute de sens -à tous les sens du terme – habitée?

les haïkus, une route

Danièle Duteil marche et c’est lorsqu’elle avance ainsi que les plus beaux haïkus – selon nous, les plus épurés- nous saisissent

un nuage un autre

sans parapluie

je marche


 touffeur

une rose s’allège

 de ses pétales


 silence

derrière le muret

la queue du chat


poésie des bords de mer

Amoureuse de ses bords de mer, du ressac incessant de son île, elle sait nous les offrir sans détour.

lumière du soir

des mouettes chamailleuses

engoulent le vent


le bruit des galets

toujours le même

jamais le même

Alors on se met à penser à Santoka qui, dans d’autres paysages, d’autres temps, a su lui aussi transmettre une immersion fusionelle et vibrante à la nature.

je m’enfonce

je m’enfonce

dans les montagnes vertes (1)

un bon compagnon de route pour une haïjine aux yeux si grand ouverts sur sa belle terre natale.

(1) Santoka, “zen, saké, haïku » aux éditions Moundarren, 2003

Danièle Duteil « Aux cotés de Santōka, les yeux grands ouverts”

éditions UNICITÉ, 2022 A commander ici

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Par Pascale Senk

Journaliste, auteure, éditrice spécialisée en psychologie, Pascale Senk se consacre à transmettre l’art et l’esprit poétique du haïku, qu’elle envisage comme une voie méditative.

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