chronique haïku 5

chronique Philippe mac&

Lorsque me vient la nostalgie des plages, lorsque me manquent l’air iodé à respirer, le ressac de l’océan à écouter, je plonge dans un recueil du haïkiste Philippe Macé. Et son dernier opus, sobrement intitulé « Vacances » (éd. Via Domitia) me comble une fois de plus en poésie de bord de mer. La douceur de ses embruns, son regard attendri sur une humanité parfois drolatique, entre huile de bronzage et marées revivifiantes, sont rares et bienvenus.

impressions douces-amères

Déjà, dans le podcast que nous lui avons consacré – et dans lequel vous pouvez entendre le poète dire ses haïkus- je notais combien l’écriture de Philippé Macé me fait penser à Jacques Tati et ses tableaux subtils de congés payés en Atlantique, entre petits plaisirs et grands bols d’air . On peut penser aussi, en savourant ses nano-poèmes, au climat sentimental de la chanson de Michel Jonasz, « On allait au bord de la mer » …

Depuis plusieurs décennies, Philippe Macé passe lui aussi ses vacances d’été sur la Cote Ouest, et plus précisément à Arcachon.

Dans son précédent recueil, « Vieux plongeoir » (éditions Pippa), le haijin déployait ses nano-poèmes selon une ligne chronologique, du début jusqu’au retour des vacances. Mais ici , il compose un haïbun fait de 34 petits chapitres introduits par un récit en prose. Ainsi, le héros, Jacques, tient son journal de vacances. Et nous entraine dans les moments forts de cette immersion…balnéaire.

La route des vacances, d’abord, avec une étape familiale un peu triste, puis l’arrivée dans la maison fermée qu’il faut réouvrir, refaire vivre…

route interminable

au bout des pavés

la plage


tour du jardin

le chat méfiant

vient aux nouvelles

le blues des vacanciers

Et oui, notre rapport au temps change quand nous sommes ainsi « en vacance », la perception du passé, du présent et de la brièveté des joies à venir fusionnent pour nous laisser dans une ambivalence douce-amère que le poète sait particulièrement bien noter et exprimer. Rien de triste dans ces petits tableaux , mais de la nuance et de la tendresse, surtout quand la météo s’y met.

pluie le jour

pluie la nuit

vacances d’été


entre deux averses

écrire des cartes postales

comme avant


parents blasés

une gamine gymnaste

se tord en tous sens

Ce que Bashô nommait « shiori », ce sentiment de sympathie pour le vivant et le monde, les recueils de Philippe Macé en sont empreints : observateur, parfois caustique et moqueur, le haïjin n’est jamais méchant.

le goût des vagues et du ciel

Toute cette poésie d’une vie modeste, à hauteur de contemporains en quête de repos, est cependant transcendée par le regard amoureux que Philippe Macé pose sur la nature si régénérante, fêtée dans des haïkus pleins d’élan.

vent du large

la mer récite

quelques nuages


vent du matin

les voiliers filent là

où seule la mer existe


nuit océane

la lune dans le ciel immense

appelle

On ressort amusé, et singulièrement régénéré d’une telle lecture, qui a la saveur du sel sur nos rêves parfois trop grands.

A lire

Philippe Macé, « Vacances », aux éditions Via Domitia et « Vieux plongeoir » illustré par Marie Macé, aux éditions Pippa.

Vous avez aimé? alors partagez et propagez de la poésie!

Par Pascale Senk

Journaliste, auteure, éditrice spécialisée en psychologie, Pascale Senk se consacre à transmettre l’art et l’esprit poétique du haïku, qu’elle envisage comme une voie méditative.

1 commentaire

  1. C’est le genre de chronique qui rend un auteur particulièrement heureux. Merci à Pascale Senk pour ce compte-rendu hautement gratifiant ! Et bonnes « Vacances » à tous ceux qui se plongeront dans ce recueil ! Amitiés, Philippe

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