De l’intime des pièces à vivre (près de la pendule, ou à l’heure du goûter près d’un enfant…) jusqu’au Cosmos ; D’ici ( sa terre bretonne, son île de naissance, Ré) jusqu’aux plus lointains “ailleurs ” (la Scandinavie ou Shikoku), du plus petit à l’immense…Danièle Duteil, en irréductible haïjine, regarde poétiquement Tout de ce monde.
Dans ce dernier recueil comme dans ceux qu’elle a déjà composés, elle nous propose un réel transfiguré par le travail des mots, ce qui est la définition même de l’acte poétique. Mais en ayant choisi de cheminer dès le titre “aux côtés de Santoka ”, l’un des maîtres classiques du haïku les plus anti-conformistes et radicaux qui soit, elle annonce ses choix d’écriture : un respect pas seulement mécanique, mais plutôt opportun du 5/7/5 ; une inspiration entièrement née de la situation ; une ouverture aux gestes humains les plus familiers…ou amusants
doucement
Il parle de la pleine conscience
son sourire édenté
salon de coiffure
les femmes de mèche
livrent leurs secrets d’alcôve
De toutes ces inspirations, celles de la poétesse en marche près de Santoka me semble la plus vibrante. Lui le mendiant qui chercha tant, de monastères zen en auberges à saké, l’apaisement de son âme torturée et elle, qui sur sa terre bretonne, chemine dans des paysages marins ou des jardins clos qui lui racontent passé et présent. Qu’ont-ils à échanger si ce n’est l’essence d’une présence au monde entière, toute de sens -à tous les sens du terme – habitée?
les haïkus, une route
Danièle Duteil marche et c’est lorsqu’elle avance ainsi que les plus beaux haïkus – selon nous, les plus épurés- nous saisissent
un nuage un autre
sans parapluie
je marche
touffeur
une rose s’allège
de ses pétales
silence
derrière le muret
la queue du chat
poésie des bords de mer
Amoureuse de ses bords de mer, du ressac incessant de son île, elle sait nous les offrir sans détour.
lumière du soir
des mouettes chamailleuses
engoulent le vent
le bruit des galets
toujours le même
jamais le même
Alors on se met à penser à Santoka qui, dans d’autres paysages, d’autres temps, a su lui aussi transmettre une immersion fusionelle et vibrante à la nature.
je m’enfonce
je m’enfonce
dans les montagnes vertes (1)
un bon compagnon de route pour une haïjine aux yeux si grand ouverts sur sa belle terre natale.
(1) Santoka, “zen, saké, haïku » aux éditions Moundarren, 2003
Danièle Duteil « Aux cotés de Santōka, les yeux grands ouverts”
éditions UNICITÉ, 2022 A commander ici
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Un grand merci, chère Pascale, pour cette belle lecture !