haïkus d’été : la possibilité des plaisirs

Préparant les prochains ateliers consacrés aux haïkus d’été, je ne me tenais plus. J’avais tellement envie d’y être, dans cette saison intense ! Alors j’ai retravaillé cet article paru précédemment dans le magazine HOLI pour dire tout ce que m’inspirent les temps chauds.

Parfums capitaux, goûts saturés, lumière au zénith… Si la parenthèse estivale était une danse, elle serait salsa, ou cumbia. Une danse énergique, et d’abord sensuelle. Car la saison d’été comble tous nos sens et les haïjins n’ont de cesse de nous le rappeler.

Ainsi, ces petites « bombes sensorielles » de la tunisienne Sarra Masmoudi

l’odeur de melon
s’échappe de la cave ~
lune du matin


canicule ~
les craquements

d’ une pastèque


à la lumière

« Zénith » : iI suffit de deux syllabes pour dire l’intensité de cette saison. Alors que le printemps et l’automne nous prennent avec nuances – ce sont des saisons dites « intermédiaires », parfois même chaotiques – l’ été, tout comme son grand opposé l’hiver – nous invite à une certaine radicalité : c’est l’heure où tout est en pleine lumière. Où les couleurs sont saturées, les paniers de fruits mûrs sont pleins, les corps se dénudent. Où, enfin, tout peut se vivre au dehors, les sens en éveil.

Dans la poésie haïku, par exemple, les poèmes d’été sont pleins de ces « touts petits » qu’on voit enfin sortir de dessous les pierres ou bien se révéler sur les murs blancs : moustiques, petites araignées du matin, lucioles de nuit… ce qui était caché se révèle, ce qui était endormi se réveille.

deux seins

superbes –

et un moustique !

Hôsai


tombée d’un brin d’herbe

elle s’envole à nouveau

ah la luciole !

Bashö

Dans nos relations, nos créations, nos loisirs…c’est la loi du outdoor qui domine : sieste sous un arbre, conversations tardives sur la terrasse avec des amis après le diner, sports dans la nature – qu’il s’agisse de nager dans la mer ou de randonner à la fraîche, l’extériorisation qui nous appelle est à son comble.

le soleil est haut –
rafraîchissant le chemin
les odeurs de menthe

PS


à contre-courant

allongée dans la rivière

l’ âme immobile

Ps

vivre pleinement, c’est maintenant

Une idée reçue, née du fait que les grandes vacances annuelles, les fameux congés payés, ont été instituées aux mois de juillet et août, laisse entendre que l’été est fait pour se reposer, suspendre ses activités. Ce n’est qu’en partie vrai. Car la meilleure saison pour s’arrêter, c’est plutôt l’hiver, qui invite à rentrer à l’intérieur et au « farniente » contemplatif devant une flambée à combustion lente.

L’été, lui, a l’énergie du feu rapide. Son solstice, c’est la Nuit de la St Jean qui dit si bien la lumière tardive, la fête en cercle autour des feux de joie, la danse de la vitalité, de la sexualité.

L’été n’est pas le temps de lambiner, mais plutôt d’avancer joyeusement vers ce qui doit être récolté. Quand les fruits sont murs, il faut les cueillir à point.

s’ autoriser le plaisir

Son abondance de parfums, de couleurs, de lumière nous invite donc à goûter pleinement ce qui a été accompli, sans sentiment d’imposture, et à profiter de ce que le cycle démarré l’hiver dernier nous a offert.

Les festivals d’été qui se multiplient dans tout le pays, célébrations musicales ou artistiques, viennent nous rappeler cela : fêter ce qu’on a accompli, même si cela est modeste et discret, et le partager avec les autres, c’est maintenant ! Exprimer sa gratitude à ceux que nous aimons, ou se féliciter soi-même, c’est maintenant.

nuit de la Saint-Jean

fragrances des souvenirs

sous le tilleul

Françoise Deniaud-Lelièvre

Il est donc temps de profiter des parfums forts et des couleurs saturées qui nous submergent pour s’interroger sur notre capacité à accueillir et vivre le plaisir. Lui faisons-nous assez de place dans notre vie ?

         D’autant plus que déjà, dès le 15 août, la lumière se met à décliner. Nos fêtes et nos succès, ces fruits gorgés de soleil que nous avons récolté méritent d’être protégés, gardés précieusement, comme les confitures dorées que nous préparons pour la saison à venir.

confitures de sureau –

dans la pénombre de la cuisine

l’été s’épaissit

V. Hoarau

Aux temps froids, elles nous réchaufferont le cœur.

les Ateliers « Haïkus de saison »

Gouter l’âme de chaque saison, en saisir l’énergie poétique, écrire les sentiments qui y sont liés…A chaque solstice, je vous propose un atelier « haïkus » offrant des temps de méditation, d’écriture poétique, d’exercices ludiques pour mieux s’ancrer dans le temps de l’année…Chaque atelier consiste en deux après-midi ou matinées de 3H (en visio conférence ZOOM jusqu’à nouvel ordre).

Le prochain atelier « haïkus d’été » pour novices aura lieu par ZOOM les 10 et 11 juin 2023 de 15h à 18h. Pour les initiés (personnes ayant déjà suivi un atelier avec moi) une résidence d’écriture en Bourgogne à Ste Vertu, pays de Colette, aura lieu du 22 et 25 août 2023.

Vous pouvez m’écrire sur leffethaiku@orange.fr pour toute demande d’informations!

Vous avez aimé? Partagez et propagez de la poésie!

Par Pascale Senk

Journaliste, auteure, éditrice spécialisée en psychologie, Pascale Senk se consacre à transmettre l’art et l’esprit poétique du haïku, qu’elle envisage comme une voie méditative.

2 commentaires

  1. Bonjour, n’étant pas disponible pour le stage débutants du 18 et 19 juin, y aura t il d’autres stages cette année?

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *